Accusé : Gerhard Ulrich

Extrait du Jugement Complet : p. 43 – 46

ULRICH Gerhard, fils de ULRICH Johann et de BUHLMANN Anna à Winterthur / ZH, originaire de Waltalingen / ZH, divorcé de ZAJAC Eulalia, domiciliée c/ Mme RUEGG, Avenue de Lonay 17, 1110 Morges
 
Pour calomnie subsidiairement diffamation, injure et complicité d’injure
 
Né le 16 décembre 1944 dans une famille d’agriculteurs, élevé par ses parents, l’accusé Gerhard Ulrich a suivi une école d’agriculteur et obtenu un certificat d’études agricoles le 20 mars 1964, avec des notes élevées. Par la suite, il a effectué des études d’ingénieur ETS en arboriculture, formation dont il a été diplômé en mai 1970, obtenant là aussi des notes proches du maximum. DE 1970 à 1999, il a travaillé au service de neuf employeurs distincts, occupant souvent des postes à responsabilités en Suisse ou à l’étranger – il parle 6 langues – dans diverses entreprises industrielles. Dans son dernier emploi salarié, il déclare avoir réalisé un revenu annuel net d’environ 150'000 francs. Il a connu une année de chômage de 1999 jusqu’au printemps 2000. En juin 2000, il a fondé une société anonyme dans le conseil en marketing qui a périclité dans la mesure où il s’en est désinvesti pour se consacrer à l’objectif exclusif d’assainir le système judiciaire. Après avoir épuisé ses économies, il a travaillé une année dans la distribution de prospectus. Depuis le 1er avril 2005, il œuvre comme coursier / distributeur à la Poste suisse, à l’unité Post Logistics, au Centre coursier de Lausanne, le 22 juin 2007, son employeur lui a délivré un certificat de travail intermédiaire élogieux, mettant en avant sa conscience professionnelle, son investissement, son autonomie, sa persévérance, sa résistance au stress, le qualifiant de collaborateur ouvert, prévenant et serviable, ayant l’estime de ses supérieurs et collègues, se comportant avec loyauté et sérieux. Gerhard Ulrich a déclaré réaliser un revenu mensuel net de 3'300 fr. environ. Il exerce son activité professionnelle à 90%. Lourdement endetté, il estime que sa dette de pensions alimentaires à l’égard de sa 2ème épouse avoisine les 200'000 fr. et qu’il doit par ailleurs d’importantes sommes à l’Etat, notamment des frais de justice dont le montant total lui indiffère. Il ne cache pas ne jamais vouloir s’acquitter de ces dettes et exercer volontairement un emploi lui procurant un revenu inférieur à celui que ses capacités et son expérience professionnelle lui permettraient d’obtenir. S’il agit ainsi c’est pour veiller à ce que son revenu demeure insaisissable. Il ajuste aussi son temps de travail pour empêcher ses créanciers d’obtenir la moindre saisie.
 
Divorcé d’avec sa 2ème épouse, l’accusé vit avec une amie à Morges. Deux de ses sœurs, entendues comme témoins, ont déclaré qu’il avait été affecté par le décès d’un de ses fils, survenu en 2001.
 
Son casier judiciaire comporte les inscriptions suivantes :
 
- 14 février 2002, tribunal de police de l’arrondissement de la Côte, 45 jours d’emprisonnement pour lésions corporelles simples, diffamation, injure, menaces, violation d’une obligation d’entretien et insoumission à une décision de l’autorité ;
 
- 25 février 2005, Tribunal de police de l’Est vaudois, 20 jours d’emprisonnement pour diffamation ;
 
- 11 octobre 2005, Tribunal correctionnel de l’Est vaudois, 15 mois d’emprisonnement, sous déduction de 13 jours de détention préventive, avec sursis pendant 5 ans, pour incendie intentionnel, dommages à la propriété et violation de domicile ;
 
- 24 novembre 2006, Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne, 21 mois d’emprisonnement pour diffamation, calomnie qualifiée, tentative de contrainte et violation de domicile. Ce dernier jugement a été confirmé par arrêt de la Cour de cassation pénale vaudoise du 21 juin 2007, exécutoire bien que ses motifs écrits n’aient pas encore été notifiées et que l’accusé ait déclaré qu’il entendait interjeter un recours au tribunal fédéral.
 
Il fait l’objet de nouvelles enquêtes pénales pour atteinte à l’honneur instruites dans le canton de Fribourg où il a encore été interpellé par la police le 24 juin 2007, soit à la veille de son procès, à l’occasion d’une distribution de tracts au domicile du juge d’instruction spécial en charge de son affaire. Il fait l’objet d’enquêtes semblables dans le canton de Vaud. Enfin, il a été inculpé d’outrage à magistrat en France.
 
Dans son jugement du 11 octobre 2005, le Tribunal de céans a indiqué que Gehrard Ulrich lui avait donné l’image d’un homme intelligent et digne, amis rigide et empêtré dans une logique personnelle imperméable. Les 2 sœurs de l’accusé qui ont été entendues au débats l’on décrit comme un homme intelligent, ayant toujours eu un caractère fort et fonceur, un sens aigu de la justice et une veine sociale l’amenant à soutenir les faibles et les opprimés jusqu’à se battre pour eux. Le même tait de caractère ressort d’un rapport de renseignements de la police de sûreté du 14 janvier 2002. On y lit en effet que certains des anciens collègues de l’accusé ont relevé que le caractère entier de celui-ci et sa manière atypique de traiter des affaires l’avaient certainement desservi. Par ailleurs, il semble avoir présenté une trop grande sûreté de soi et une propension à outrepasser ses droits, se montrant colérique, susceptible et parfois même procédurier. Il aurait ainsi très mal accepté son licenciement de Tetrapak System SA, qui l’employait comme responsable de vente en URSS, et son licenciement de CMSE où il fonctionnait comme chef du service extérieur.
 
De manière inattendue, son défenseur a plaidé qu’il y avait lieu de retenir à sa décharge l’application de l’article 11 aCP ou de l’article 19 nCP, soit une responsabilité pénale diminuée (notes de plaidoirie p.29, ajout manuscrit). En effet, auparavant, l’accusé n’a jamais soutenu que le Tribunal devait éprouver un doute quant à sa responsabilité pénale. On ignore donc si cet argument est de son fait ou s’il a été improvisé isolément par son défenseur. Quoi qu’il en soit, l’accusé a toujours farouchement nié que la question même de sa responsabilité pénale puisse être discutée. Il considère qu’émettre un doute à ce sujet revient à le discréditer et à tenter abusivement de le neutraliser dans le combat qu’il mène contre les défaillances de la justice. On lit à cet égard en page 3 d’un document intitulé plaidoyer, qu’il a rédigé le 14 février 2002, soit l’argumentaire qu’il avait adressé au Tribunal de police dans son procès de février 2002, « pour quelle raison avez-vous voulu m’envoyer chez les psychiatres de votre choix… ? » L’une de ses sœurs, psychologue de formation, a déclaré qu’à sa connaissance son frère n’avait jamais suivi de traitement psychiatrique ou psychologique et qu’elle-même n’avait jamais estimé nécessaire de lui recommander de suivre un traitement de ce type. Aucun document médical de nature à éveiller un doute quant à la santé mentale de l’accusé n’a été produit. De plus, aucun des 4 jugements le concernant rendus de 2002 à 20006 ne fait état de l’article 11 aCP. En  revanche, il est évident qu’il présente des traits de caractère inhabituels en ce sens qu’il s’avère particulièrement entêté et déterminé dans ses démarches, allant jusqu’à considérer que le combat qu’il mène est celui du bien contre le mal, ce qui témoigne d’un certain absolutisme et de son refus de prendre les autres en considération tout en s’autojustifiant par avance de tout excès.
 
La vie de l’accusé a basculé en été 2000 lorsque, dans le cadre d’un conflit matrimonial, son épouse a obtenu, par voie de mesures pré-protectrices de l’union conjugale, qu’il lui soit ordonné de quitter le domicile conjugal. A partir de là, il s’est cabré et a enchaîné les heurts avec le système judiciaire, l’accusant de dérapages chaque fois qu’il donnait raison à son épouse. Il a créé et dirige l’association « Appel au peuple » et voue depuis lors son existence à une croisade acharnée contre ce qu’il appelle les dysfonctionnements judiciaires. Il revendique mille adhérents, soit environ 80% de « victimes », sans distinguer entre les quérulents pathologiques et les déçus capables de discernement, et 20% de sympathisants. S’il admet que les débuts ont été difficiles, notamment le recrutement des 20 premiers membres, il souligne le succès de son entreprise, faisant valoir son extension territoriale à la Suisse romande, au territoire national et même à l’étranger. Il considère, non sans forfanterie, que son association joue désormais un rôle de contre-pouvoir, ayant acquis un statut d’interlocuteur institutionnel reconnu, influençant l’appréciation du fonctionnement du pouvoir judiciaire par les pouvoirs tant législatif qu’exécutif, et pesant par ses campagnes sur la carrière de certains fonctionnaires pris pour cible. Pour le surplus, il n’entend pas donner davantage d’informations sur son groupement. Il dit toutefois que celui-ci dispose d’argent et de structures, donc que son action ne sera pas neutralisée si lui-même ou son co-accusé était condamné à purger des peines privatives de liberté. Il a clairement fait savoir qu’il poursuivrait son action, en appliquant les mêmes méthodes, tant qu’il n’obtiendrait pas satisfaction, soit aussi longtemps qu’il ne soumettrait pas la justice à son diktat pour qu’elle fonctionne selon ses exigences.